Plus de 82 000 contenus pédopornographiques ou terroristes visés par des demandes de retrait en 2022


Plus de 82 000 contenus en ligne à caractère pédopornographique ou faisant l’apologie du terrorisme ont fait l’objet d’une demande de retrait par les autorités, et près de 400 sites ont été visés par une demande de blocage administratif en 2022, selon un nouveau bilan dressé par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) et dévoilé mardi 18 avril.

L’Arcom est, depuis le mois de juin 2022, le nouvel organe de contrôle de cette mesure, instaurée en 2014, qui permet de demander aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) le blocage de certains noms de domaines sans passer par une décision de justice. C’est l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de communication (OCLCTIC), gestionnaire de la plate-forme Pharos, qui est chargé d’émettre ces demandes.

Lorsqu’un contenu à caractère pédopornographique ou faisant l’apologie du terrorisme est signalé, les forces de l’ordre vont d’abord demander son retrait à l’éditeur ou l’hébergeur du site concerné, et en l’absence de réponse ou de mesure prise, demander ensuite aux FAI de bloquer le nom de domaine. L’OCLCTIC peut également enjoindre aux moteurs de recherche le déréférencement de certains sites. De son côté, l’Arcom s’assure a posteriori que ces demandes ne sont pas abusives.

« Contenu de masse »

Les chiffres communiqués dans le nouveau bilan de l’Arcom sont inférieurs à ceux de l’année 2021 (133 000 demandes de retrait environ) mais restent élevés, et concernent dans leur immense majorité des images à caractère pédopornographique (67 577 demandes de retrait et 381 demandes de blocage). « On est sur du contenu de masse », a expliqué au cours d’une conférence de presse Laurence Pécault-Rivolier, magistrate et personnalité qualifiée au sein de l’Arcom, désignée pour contrôler les demandes de retrait et de blocage transmises par les autorités.

Les contenus visés par ces demandes ne représentent, en effet, qu’« une infime partie » du total, puisqu’une large part est auparavant bloquée par les « systèmes de détection automatique des plates-formes », explique la magistrate. Les images de violences sexuelles sur mineurs diffusées en lignes sont souvent des contenus identiques repartagés sur plusieurs sites, et plusieurs grandes plates-formes du Net ont des outils techniques leur permettant parfois de détecter automatiquement quand une vidéo déjà connue des autorités est publiée par un internaute.

L’Arcom note, dans son rapport, que les contenus à caractère pédopornographique « font l’objet d’une dissémination particulièrement importante sur les sites d’hébergement de contenus, notamment vidéo », mais que « les fournisseurs de ces sites tendent, généralement, à retirer rapidement les contenus dès lors qu’ils leurs sont signalés ». Plus de 61 000 contenus à caractère pédopornographique ont ainsi été retirés par des hébergeurs ou éditeurs de sites en 2022, sur 67 577 images visées par des demandes de retrait.

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L’Arcom souligne néanmoins qu’un « grand nombre de contenus illicites » (sans préciser leur nature) ne sont accessibles que sur les parties « payantes » de certains sites, et que l’OCLCTIC ne dispose pas, aujourd’hui, des moyens d’accéder à ces endroits spécifiques, « ce qui limite », pour le régulateur, l’action de l’office.

Des images d’Al-Qaida et du groupe Etat islamique

La majorité des contenus faisant l’apologie du terrorisme et visés en 2022 par des demandes de retrait, eux, proviennent du groupe Etat islamique et d’Al-Qaida, selon Mme Pécaut-Rivolier. Il peut s’agir de « films d’apologie » scénarisés, qui contiennent en général « des images absolument abominables de décapitation », ou encore de « journaux », avec des « comptes-rendus d’actions menées pendant la semaine » et listant « le nombre d’attentats, le nombre de morts ».

Dans un autre ordre d’idées, Mme Pécaut-Rivolier a cité l’exemple de « haines absolument terribles » provoquées par une caricature du journal satirique Charlie Hebdo en février à propos du séisme en Turquie. Selon elle, le dessin s’est attiré sur les réseaux sociaux des « commentaires [qui relevaient] du contenu terroriste », avec des phrases comme « Notre tort a été de ne pas tous les tuer », en référence à l’attentat islamiste qui a décimé la rédaction en janvier 2015. Selon le rapport, un seul cas, en 2022, a conduit l’Arcom à demander l’annulation d’une demande de retrait de contenu à caractère terroriste : il s’agissait d’une vidéo publiée par une page Facebook d’actualité en Afrique de l’Est.

Mme Pécaut-Rivolier examine les contenus qui font l’objet d’une demande de retrait chaque semaine lors d’une séance de visionnage. Chaque séance permet d’examiner 5 000 contenus. Elle est assistée par douze collaborateurs volontaires au sein de l’Arcom, qui se relaient à raison de deux par séance pour limiter leur exposition à ces contenus violents.

Tous se réunissent tous les deux mois sous l’égide d’un psychologue pour parler de ce qu’ils ont vu, un « système d’évacuation » rendu nécessaire par « la violence difficilement descriptible » de ces contenus, selon la magistrate. « On a des images qui nous restent en tête », a-t-elle insisté. « La grosse difficulté, c’est qu’on ne peut parler de ce qu’on a vu à personne » de l’entourage.

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Le Monde avec AFP



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